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Sélection de céréales biologiques dans l’Ouest canadien

Centre d'agriculture biologique du Canada

Depuis de nombreuses années, les producteurs biologiques demandent que des variétés adaptées aux conditions de croissance uniques qui prévalent dans leurs fermes soient mises à leur disposition. Ont-ils progressé dans la satisfaction de leur demande?

À l’heure actuelle, les céréaliers biologiques utilisent des variétés sélectionnées pour les systèmes non biologiques ou « conventionnels ». Ils sont nombreux à estimer que ces variétés, cultivées dans des parcelles expérimentales recevant des engrais de synthèse et presque totalement désherbées, risquent de ne pas convenir à leur mode de production.

La plupart des producteurs suggéraient que les améliorations de la résistance aux maladies et du rendement et le raccourcissement du temps requis pour atteindre la maturité importaient davantage que la correction de tout écart de réponse aux intrants.

Ainsi, quelques céréaliers des Prairies se sont attelés à élucider la question. Cependant, plusieurs années s’écoulent avant qu’une nouvelle variété ne puisse être mise sur le marché. La longueur du processus de sélection rend les sélectionneurs prudents, lorsqu'il s'agit de suivre de nouvelles orientations. Pour ces derniers, la première étape de toute sélection destinée à la production biologique au Canada est une « validation de principe », c’est‑à‑dire une étude scientifique confirmant le bien‑fondé d’une telle sélection.

Todd Reid et Dean Spaner, à l’Université de l’Alberta, ont croisé deux variétés de blé très différentes pour produire 79 lignées distinctes. Ils ont cultivé ces lignées selon les normes biologiques et de manière conventionnelle, puis ont comparé les rendements. Les lignées classées dans les 10 % ayant obtenu les meilleurs rendements en régie biologique n’étaient pas les mêmes qu’en mode conventionnel. Cela indique que les variétés standard ne seraient pas optimales pour la production biologique et que les céréaliers biologiques bénéficieraient de sélections en régie biologique.

Une deuxième expérience de validation de principe a été menée à l’Université du Manitoba par Anne Kirk, Stephen Fox et Martin Entz. Les chercheurs ont cultivé des populations de blé sur quatre générations en régies biologique et non biologique. Ils ont ensuite fait pousser les meilleures lignées sélectionnées dans chaque population et chaque environnement sous les deux régies.

Ils ont établi que toutes les populations produisaient des rendements similaires en culture conventionnelle, qu'elles aient été sélectionnées en régie biologique ou non biologique. Les populations sélectionnées en régie biologique, par contre, poussaient mieux en culture biologique que celles sélectionnées en régie non biologique. Ces sélections biologiques présentaient de plus gros grains et des teneurs en protéines supérieures, quel que soit le mode de culture. Cette expérience a confirmé la pertinence d'un programme de sélection biologique.

Une fois la validité du principe démontrée, les chercheurs se sont penchés sur la mise au point de variétés de blé et d’avoine pour la culture biologique. Aux universités de la Saskatchewan, de l’Alberta et du Manitoba, des variétés de céréales traditionnelles et modernes ont été cultivées biologiquement dans des fermes expérimentales et des fermes biologiques. Les chercheurs ont relevé les caractéristiques des variétés qui produisaient de bons rendements en régie biologique. Les variétés vigoureuses à la levée (qui sortent de terre et couvrent le sol rapidement) concurrencent efficacement les mauvaises herbes. Les variétés hautes à feuillage fourni donnaient souvent de bons résultats. 

Les critères de sélection des programmes de sélection biologique incluent des caractéristiques agronomiques telles que la hauteur, la résistance de la paille, le rendement céréalier, la maturité précoce et la résistance aux maladies et qualitatives telles que le poids spécifique, l’aptitude à la mouture, la fermeté du gluten et la valeur boulangère.

En 2010, des chercheurs de l’Université du Manitoba et d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) à Winnipeg ont introduit une nouvelle méthode de sélection végétale dans les Prairies : la sélection participative du blé « participative », car les agriculteurs sont les artisans du processus. La participation des agriculteurs garantit que les recherches demeurent en rapport avec les besoins de ces derniers, en multipliant les environnements dans lesquels la sélection est effectuée.

Les scientifiques demandent aux participants de faire pousser une ou plusieurs populations de blé sur une parcelle de 30 m2 environ. Les agriculteurs doivent ensuite parcourir leurs parcelles pour enlever les plantes qu’ils n'aiment pas (trop petites, faibles, versées, malades ou inadaptées). Ils gardent les graines produites par les plantes restantes et les sèment l’année suivante. Après plusieurs générations, la sélection « négative » à laquelle ils ont procédé donne des populations adaptées aux conditions et au mode de culture de l'endroit. Les chercheurs pensent que les populations conservent ainsi leur diversité génétique, sont plus susceptibles de résister aux stress et aux variations de l’environnement et correspondent davantage aux préférences des producteurs.

Les producteurs biologiques des Prairies canadiennes seraient‑ils bientôt en mesure de cultiver des variétés de céréales sélectionnées pour leurs systèmes culturaux uniques? Le processus de sélection est long; les recherches ont débuté en 2004 et des variétés ne sont proposées pour l’homologation que depuis peu. Selon Stephen fox, chercheur sélectionneur de blé à AAC (Winnipeg), des variétés candidates commencent à subir les essais d'homologation.  Jennifer Mitchell‑Fetch, chercheuse sélectionneuse d’avoine dans les mêmes installations, affirme quant à elle que des variétés devraient être prêtes pour l’homologation dès 2013.


Cet article a été rédigé par Brenda Frick pour le CABC grâce au soutien financier de la Grappe scientifique biologique du Canada (une partie de l’ du Cadre stratégique Cultivons l’avenir d’Agriculture et agroalimentaire Canada. La Grappe scientifique biologique est le fruit du travail de coopération accompli conjointement par le
CABC, la et les partenaires de l’industrie.